Le paradis du marié et de la mariée, Philip Galle

« Reciproca sponsae sponsiqve ad hortum suum invitatio » (Une invitation mutuelle de la mariée et du marié dans leur jardin)

« Reciproca sponsae sponsiqve ad hortum suum invitatio » (Une invitation mutuelle de la mariée et du marié dans leur jardin) 850 480 V.M. Kwen Khan Khu

Très chers/ères amis/ies :

J’ai le plaisir de vous faire parvenir la présente gravure qui a pour titre…

…RECIPROCA SPONSAE SPONSIQVE AD HORTUM SUUM INVITATIO
─ ‘Une invitation mutuelle de la mariée et du marié dans leur jardin’ ─

Une invitation mutuelle de la mariée et du marié dans leur jardin, Philip Galle

Je tiens tout d’abord à vous informer qu’il s’agit de l’un des dessins réalisés par le graveur Philip Galle ─ 1537-1612 ─ comme illustration d’un livre intitulé Paradisus sponsi et sponsae : in quo Messis myrrhae et aromatum, ex instrumentis ac mysterijs Passionis Christi colligenda, vt ei commoriamur, ‘Le paradis du marié et de la mariée : où la récolte de myrrhe et d’arômes doit être recueillie à partir des instruments et des mystères de la passion du Christ afin que nous mourions pour lui’.

Le texte en latin qui apparaît au bas du dessin et une traduction possible :

Sponse, veni; tuus en te degener invocat hortus. Suaui-amarus et hic te mihi, sponsa, vocat.

‘Viens, mon fiancé, voici, ton jardin indigne [t’]invoque. Doux-amer, et ici il t’appelle à moi, ta fiancée’.

Le texte en français qui apparaît au bas du dessin et sa traduction :

Vien, cueiller, cher espous, les fruits de ton parterre. Mais que ces aigre-dous aussy ton cueur en-serre.

‘Viens, recueille, cher époux, les fruits de ton jardin. Mais laisse aussi ces choses douces-amères envelopper ton cœur’.

Le texte qui accompagne le personnage qui se trouve en haut à gauche : Iustitia Originalis, ‘Justice originelle’.

L’épouse dit :

Veniat dilectus meus in hortum suum. Cant.5
[Comedat fructum pomorum suorum].

‘Que mon bien-aimé vienne dans son jardin et qu’il mange du fruit de ses pommes’.

Ce que dit l’époux, ci-dessous, fait partie du même verset n° 1 du chapitre 5 du Cantique des Cantiques :

Le texte qui accompagne le Christ :

Veni in hortum meum, soror mea, sponsa. Cant. 5

‘Je suis venu dans mon jardin, ma sœur, ma fiancée’.

Quel est le sens réel de toutes ces phrases latines citées ci-dessus ?

Tout d’abord, pour entrer dans cette belle gravure, nous devons observer les deux parties de celle-ci, l’une en haut et l’autre en bas. Dans la partie supérieure, nous voyons une femme invitant son mari à entrer dans le jardin de l’amour. Cette partie nous montre des satyres lucifériens dansant et jouant avec un cor une musique luciférienne, accompagnés d’un serpent ─ tentateur ─ enroulé autour de l’arbre de la science du bien et du mal ─ la sexualité ─. Il est incontestable que la sexualité est directement liée au Chemin Secret ─ par le biais de l’Alchimie ─, mais à condition que la tentation luciférienne soit vaincue par la sublimation du coït hermétique.

Si nous ne le faisons pas, notre destin sera équivalent à celui de l’homme que nous voyons allongé dans la partie supérieure gauche de cette gravure, avec la mort à ses côtés, comme celle qui vainc toujours les faibles ─ c’est pourquoi le squelette a une épée dans sa main droite ─. C’est la raison de la couronne qu’elle porte sur la tête, car c’est elle qui règne finalement à la fin de nos vies.

À l’extérieur du premier jardin ─ où nous observons les satyres ─, nous voyons un couple courir, fuyant un ange qui, avec une épée flammigère, les éloigne du jardin des délices, comme cela s’est produit avec Adam et Ève dans la Genèse hébraïque. Depuis lors, cet ange se jette sur le genre humain, selon la volonté divine, en appliquant le karma aux masses humaines.

Derrière eux, un lion les poursuit également. C’est le Lion de la Loi, les Archontes du Destin qui poursuivent tous les fornicateurs.

Dans la partie inférieure de la gravure, un couple apparaît à nouveau, formé par le Christ et une femme qui veut suivre ses pas. Le Christ invite cette femme au jardin de l’amour, mais enveloppés du parfum de la myrrhe. Gnostiquement, la myrrhe est associée à la mort intérieure, la mort psychologique ou la mort de Satan dans notre anatomie psychique.

La femme suit le Christ mais porte un cœur dans sa main droite pour indiquer la nécessité de faire du coït une forme de prière. D’autre part, elle porte une couronne sur la tête, nous indiquant qu’elle est l’une des âmes appelées à vivre le drame christique, car il est bien connu que pour incarner notre Seigneur de Perfections particulier, individuel, il est nécessaire de travailler dans la Forge des Cyclopes ou Forge de Vulcain. C’est pourquoi le Christ appelle la femme « mon épouse, ma sœur »… C’est un appel de son Christ intime à l’âme de cette femme.

Le jardin du Christ est rempli des instruments avec lesquels sa crucifixion a été consommée. Cela signifie que, si nous voulons fouler l’AMOUR CHRISTIQUE, nous devons consommer dans notre intimité le baptême par le feu divin, par l’INRI de la Gnose. Ce jardin est, certes, tel qu’il est décrit dans cette gravure : DOUX ET AMER à la fois. Il est plein de roses et d’épines qui blesseront constamment nos chairs physiques et animiques par les processus qui sont mis en marche une fois que nous avons accepté de vivre ce que l’on appelle la VOIE SÈCHE ou VOIE DIRECTE des alchimistes de tous les temps.

Il est écrit que nous avons le droit de respirer l’arôme des pommes de l’amour, mais pas d’avaler ces pommes ; c’est ce qu’affirme la Gnose et on nous avertit également : AMOUR EST LOI, MAIS AMOUR CONSCIENT. Et saint Paul nous a avertis en son temps : « Tout péché sera pardonné sauf celui qui porte atteinte à l’Esprit Saint » ─ la fornication ─.

Pour vivre l’AMOUR CHRISTIQUE, nous devrons être trahis ─ d’où le sac de pièces de monnaie qui apparaît dans le jardin christique ─, nous devrons expérimenter les trois clous de la croix du rédempteur ─ qui symbolisent les trois grandes purifications : par l’eau, par le feu et par le fer ─, nous subirons la couronne d’épines ─ internement parlant ─ à chaque pas de notre voyage, nous serons victimes de l’insolence de l’Ego ─ voir le fouet ─, nous devrons acquérir la volonté christique ─ indiquée par le marteau ─, etc., etc., etc.

Après ces discours, permettez-moi de vous offrir quelques phrases célèbres très opportunes :

« Si nous nous examinions de temps en temps, le résultat naturel de cet examen serait notre perfection ».
Montaigne

« La perfection est une vertu merveilleuse qui pèse si lourd que l’homme ne peut pas la supporter ».
Ortega Munilla

« Celui qui reconnaît consciemment ses limites est le plus proche de la perfection ».
Goethe

« Les hommes ne peuvent pas être plus parfaits que le Soleil. Le Soleil brûle avec la même lumière qui réchauffe. Le Soleil a des taches. Les ingrats ne parlent que des taches. Les reconnaissants parlent de la lumière ».
José Martí

« La perfection poussée à l’excès meurt de pléthore ».
Shakespeare

FIAT JUSTITIA AUT PEREAT MUNDUS.
─ ‘Que justice soit faite, le monde dût-il en périr’ ─.

KWEN KHAN KHU